Le leadership. Le sujet a eu un gain d’intérêt remarquablement grandissant au cours de la décennie précédente. Formations, conférences, programmes, évènements, le leadership est devenu le sujet de discussions des Congolais, tout âge et milieu confondus.
Toutefois, les discussions ne sont pas venues sans certaines mauvaises conceptions, en commençant par celle qui compromet la définition même du leadership dont il est question.
En écoutant les caricatures de la rue de qui est un leader, on se rend vite compte de l’ampleur des conceptions erronées du sujet qui est plus grave pour continuer à parler du leadership sans clarifications.
Pour certains, le mot leadership évoque l’idée d’un engagement politique. Un leader est compris comme étant un politicien. D’autres, associent le leadership avec la popularité. Un leader c’est quelqu’un qui est populaire. D’autres encore le terme leur fait penser à l’esprit d’initiative. Un leader c’est un entrepreneur. Je suis toujours amusé de voir la fierté que certaines personnes affichent quand elles se présentent en utilisant le titre « Jeune leader ». En s’introduisant de la sorte, ils veulent envoyer une image publique de leur personne. Une image qui est sensée, selon ma perception, attirer l’attention sur leur personnalité. Laquelle exactement ? Les réponses sont variées. Néanmoins, La société, dans sa narrative collective, a accepté que les leaders sont une catégorie d’individus à part, un petit groupe des illuminées, à la petite voix très audible à qui on porte l’attention. Je suis conscient que ma propre caricature est un peu exagérée, cependant, elle me semble être le résumé de toutes les mauvaises compréhensions qui entourent le leadership.
La question reste cependant, qu’est-ce que le leadership ? Dans sa définition minimalement acceptable, le leadership est l’influence. John Maxwell a dit, « le leadership c’est l’influence. Rien de plus, rien de moins ». Ceci n’est pas complètement vrai. Certes, le leadership n’implique pas moins que l’influence, mais surement bien plus. En plus, il importe de qualifier nos propos pour éviter toute errance intellectuelle.
Le problème avec la définition selon laquelle le leadership est l’influence au sens générique du mot, est que le leadership devient rapidement confondu à la popularité. Herman Amisi, l’humoriste comédien, a suffisamment de l’influence sur la Jeunesse congolaise, y compris peut être moi-même. Est-ce pour autant qu’il est mon leader ? Peut-être qu’il est leader dans son industrie, ou alors leader dans son organisation, mais difficilement leader de nous tous, et cela, en dépit de l’influence qu’il a sur nous. À ce stade, il importe aussi de préciser que votre modèle, ou icône, à moins de travailler avec lui n’est pas nécessairement votre leader. Il peut être quelqu’un que vous voulez ressembler, il est surement quelqu’un que vous admirez mais pas votre leader. La raison de mon affirmation deviendra évidente un peu plus tard.
Il importe aussi de tourner notre regard rapidement et brièvement sur le leadership et notre vision du monde comme Africains. L’une de valeur qui reste à Juste titre sujet de beaucoup d’admiration est le respect et la considération que nous portons aux personnes âgées. Les vieux sont toujours pris en haute estime et leur opinion est toujours prise avec considération. Mais nous sommes aussi dans ce que nous pouvons qualifier de la culture de pouvoir et de peur. Dans une culture pareille, les relations ne sont pas nécessairement basées sur le respect et les gens ne disent pas nécessairement leur opinion la plus sincère. Dans ces conditions, il est facile de supposer, à tort, que toute personne âgée à qui ont obéi est un leader.
Il devient donc évident que le leadership, dans notre contexte, n’est pas ce qu’il paraît. Ce n’est pas la popularité, encore moins l’âge ni même la sagesse ou encore l’entreprenariat.
Jusqu’ici nous avons répondu négativement à la question, ce que n’est pas le leadership. Le temps est approprié pour répondre positivement à la question. Cependant, quiconque veut définir le leadership se rend vite compte qu’il y aurait autant des définitions du leadership qu’il y a des penseurs et théoriciens en la matière. Bien que toutes les définitions puissent avoir une certaine validité, certaines sont plus utiles et plus instructives que d’autres. Stephen R. Covey par exemple définit le leadership comme la capacité à communiquer le potentiel de quelqu’un jusqu’à ce qu’il arrive à le voir en lui-même. J’admire cette définition, parce qu’elle met l’accent sur le fait que le leadership doit être tourné vers les autres et qu’il doit aider les autres à saisir le sens leur propre grandeur. Ceci reste un de plus grands privilèges d’un leader. Toutefois, je trouve que cette définition nous laisse sur notre faim et s’avère vague et par conséquent très peu utile.
Il faut plutôt se tourner vers d’autres penseurs, en particulier les académiciens, pour essayer d’apporter de lumière sur ce que nous essayons de définir.
Northouse, P. G. dans son livre Leadership ; théories et pratiques, définit le leadership comme la capacité à influencer, guider et inspirer les autres à travailler ensemble pour atteindre des objectifs communs. Une définition proche de celle-ci est celle proposée par G. Yukl dans son livre leadership in Organisation selon laquelle le leadership est le processus par lequel un individu guide, influence et motive les autres membres d’un groupe à contribuer activement à la réalisation des objectifs du groupe. Ces deux définitions sont instructives et utiles. Tout d’abord parce qu’elles sont proches du sens du mot lui-même. Dériver de l’Anglais, To Lead (d’où nous vient notre mot leadership) veut dire guider, diriger ou conduire. Ces deux définitions retiennent bien cette idée de conduire. Elles contiennent aussi l’idée du groupe ou d’organisation. Parce que le leadership n’est pas une influence diffuse. C’est une influence focalisée, le leadership est toujours exercé sur un groupe bien défini Certes, il existe ce qu’on appelle des leaders de pensées, des personnes dont leurs pensées influencent le monde. Beaucoup de ces personnes sont des grands leaders. Mais Je maintien qu’il est prudent de les voir comme des penseurs aussi loin que l’effet de leur pensée sur nous est concerné. Seuls des leaders en rapport avec les organisations dans lesquelles ils ont influencé les autres directement pour un but précis. Et c’est ça la troisième force de ces définitions. Elles intègrent la notion d’objectif à atteindre. Ceci est fondamentale parce que le leadership implique par nécessité la notion d’objectif, autrement dit, de destination.
Cependant, je ne recommanderais pas ces définitions dans notre contexte pour deux raisons. Tout d’abord, elles manquent une mention explicite de la vision. La vision est la représentation du monde que nous voulons créer. Elle est la force motrice de la motivation. Elle nous donne la raison et l’énergie de nous réveiller chaque matin en dépit du fait que nous nous soyons endormis trop tard. Sans vision, il est difficile de motiver l’équipe. Ensuite, elles manquent l’idée de recherche des ressources. Mais plus important, comment parler des objectifs s’il n’y a pas une vision vers laquelle ils pointent ?
C’est pourquoi, deux autres définitions complémentaires sont nécessaires à celles que nous venons de proposer. Celle proposée par Kouzes, J. M., & Posner, B. Z. dans leur livre, How To make extraordinary thing happen in organisations. Ils maintiennent que le leadership consiste à établir une vision, à communiquer cette vision aux autres et à les motiver à la poursuivre ensemble avec enthousiasme et engagement. Cette définition est utile et complète celles que nous avons proposé un peu plus haut parce qu’elle insiste sur la vision. Le leadership est l’entreprise de production et de vente d’une vision. Une vision, pas plusieurs. Nous ne croyons pas qu’un leader puisse avoir plusieurs visions. Il peut avoir plusieurs objectifs, plusieurs fonctions, plusieurs casquettes mais pas plusieurs visions. Remarquer que la définition assure que le leader doit établir une vision, communiquer la vision, motiver à poursuivre la vision. Dans cet ordre. Les trois sont nécessaires. Parce qu’une vision peut être grandiose, si elle n’est pas communiquée, elle n’aura aucun effet. Elle peut tout aussi être très bien communiquée et devenir claire, s’il n’y a pas des motivations à la poursuivre, elle ne portera pas des fruits.
L’autre définition est celle proposée par le théoricien Richard Daft, dans son livre The leadership expérience. Il définit le leadership comme la capacité à mobiliser les ressources internes et externes, à inspirer la confiance et à créer un environnement propice à l’accomplissement des objectifs communs. ». Certes, elle ne capture pas tout ce qu’il y a au leadership, néanmoins, il met l’accent sur : tout d’abord la mobilisation des ressources, je suppose que ceci implique à la fois les ressources humaines, matérielles, financières et en temps. Ces ressources sont mobilisées à l’interne et à l’externe. La nécessité d’insister sur la mobilisation des ressources comme parties du leadership ne saurait être exagérée en particulier dans notre contexte. Il n’est pas en effet rare d’entendre des jeunes gens dire qu’ils ont beaucoup d’idées mais qu’ils n’ont pas des moyens. Je suspecte que cela ne soit vrai. S’ils avaient autant d’idées, ils auraient autant des moyens. Ceci peut sonner brutalement insensible. J’entends les objections des centaines des personnes qui n’ont pas réussi à faire décoller leurs idées faute de moyens. Certains diraient que je suis ignorant ne sachant pas de quoi je parle, d’autres peut-être diraient que je manque de sympathie. Pourtant, il n’en demeure pas moins vrai que vous n’avez aucune idée en tête à moins de savoir comment vous allez mobiliser les ressources pour matérialiser cette idée. Certains d’entre nous qui croient donc avoir plusieurs idées en tête devraient commencer à réviser l’opinion que nous avons de nous-mêmes, peut-être que nous n’avons pas des idées tant que ça finalement. Notons aussi que bien que nous ayons soutenu au début l’idée selon laquelle, le leadership n’est pas l’entrepreneuriat, aucune tentative entrepreneuriale ne pourra réussir sans un leadership de qualité.
Daft continue, le leader doit être digne de confiance. C’est ici la pierre d’achoppement du leadership congolais. Nous n’avons pas beaucoup des leaders parce que nous avons très peu des personnes dignes de confiance. La confiance naît de la compétence, C’est-à-dire la capacité à produire des résultats et le caractère, ou encore la probité morale au-dessus des reproches. Est-il possible de trouver des personnes très compétent au Congo, et d’une moralité irréprochable ?
Il faut penser à l’environnement interne, où le travail du leader consiste à aligner la culture de l’entreprise aux principes et valeur de celle-ci en adéquation avec ses priorités. Et l’environnement externe qui consiste à réduire au maximum les forces coercitives qui empêcheraient la vision de s’implanter.
Nous venons ici de parler brièvement des questions qui prendrait des centaines des pages pour les développer adéquatement, nous espérons néanmoins avoir jeter les bases des discussions sur le leadership sans ambiguïté. Pour des raisons d’espace, nous allons nous arrêter par là.
En résumé le leadership devrait être compris comme la capacité à mobiliser les ressources nécessaires et influencer, guider, motiver par sa personnalité l’ensemble de l’équipe et toutes les parties prenantes à la réalisation d’une vision partagée d’un meilleur avenir.
Ceci n’est aucunement ma propre définition, elle n’est que le résultat de ce que j’ai pu mettre ensemble après l’analyse de ce que quelques auteurs ont pu exposé. Toutefois, Compris sous cet angle-là, il me semble que nous sommes dans une meilleure position de discuter au-delà de la définition.
Auteur: Consolateur Jean
le fait de:
– clarifier la difference entre un leader au vrai sens du terme à celui du sens populaire
le fait de:
– parler de l’importance de lier le leadership à la “vision”
ces deux éléments font de cet article, un texte à partager à nos “jeunes leaders”…